Le visage du musicien antillais grimace de plaisir, violon contre l'oreille. Un coupeur de canne à sucre de blanc vêtu travaille dans le champ où éclatent un vert cru et un rouge flamboyant. Les deux affiches annoncent les « Images des isles ». Caraibes colorées.
Un pêcheur lance son vaste filet bleu; au marché, des femmes épanouies vendent fleurs ou légumes,
un paysan s'en va sur un âne chargé : petits détails de la vie quotidienne aux Antilles.
Et c'est bien la vie qui éclate sur toutes les toiles.
Le trait précis, épuré, terriblement efficace, suffit à traduire le mouvement.
A la fois réalistes et épurées, ces œuvres de lumière gardent aussi leur mystère et leurs contrastes.
Si, d'un visage dessiné au fusain, jaillit un regard franc et direct, d'autres personnages peints de dos ou abrités sous un vaste chapeau gardent leur secret. Des sujets jaillissent l'effort, le dynamisme et le geste laborieux. En contrepoint, cette Man Aglaé que les années ont visiblement usée, lasse et sereine, apporte une note de tendresse.
Marie-Jo Pérec s'élance en un élégant mouvement savamment décomposé. Autre peinture, celle issue de l'aérographie, mosaïque subtilement créée pour un monde bougeant, trépidant, tout en élan suspendu. Deux techniques, deux moyens d'expression. Il est intéressant de voir côte à côte soit un éclatant combat de coqs ou une course de yoles exprimés avec l'un et l'autre procédés. Signé Sarciat pour la peinture qui se veut spontanée, Ydan pour l'aérographie plus technique. Sarciat aux pinceaux, Ydan au pistolet.
Contact charnel dans un cas, distance étudiée, maîtrisée dans l'autre. « C'est comme si Sarciat faisait du vélo, alors qu'Ydan pilote un avion », se plait à dire l'artiste.
Double approche de l'art pour un créateur riche d'une double appartenance culturelle aux Antilles et au Sud-Ouest. Et un même et réel au Sud-Ouest, Et un même et réel talent. Qu'il s'agisse de Sarciat ou d'Ydan, les thèmes sont traités avec un semblable bonheur. La passion reste unique. On a remarqué ses derniers travaux : sujets de fresques sculptées, fins et stylisés, exubérants et précis. Les originaux décorent la salle omnisports de Saint-Geours-de-Maremne.
C'est une nouvelle facette de ce jeune artiste débordant d'enthousiasme, d'idées. Demeure la recherche constante vers l'essentiel d'un artiste en perpétuelle évolution. Dans la difficile quête qui l'a mené de la gestuelle du paysan à un départ d'athlétisme, de la course de yoles à celle de Formule 1, de la rapidité du combat de coqs à la tauromachie.
Des images des iles de calme et de lenteur à la frénésie du monde moderne. Normal lorsqu'on a 30 ans à peine et qu'on est un autodidacte particulièrement doué, bouillant du désir de s'exprimer. « Je ne conçois pas la vie sans la
création. Je hais la monotonie. »
Exposition Sarciat Ydan. Bibliothèque municipale, jusqu'au 16 août.
HÉLÈNE LARETURE
,